Enchevêtrements – France Jobin – Français

La mécanique quantique m’a ouvert les portes d’un monde complexe, qui ne se laisse pas facilement appréhender. Ce monde de probabilités infinies nous apprend que nos yeux ne sont pas du tout assez perçants pour percevoir l’univers tel qu’il est réellement. Cette perspective me parle beaucoup, car j’y vois une ressemblance avec ma façon d’écouter lorsque je fais mes enregistrements de terrain : je n’entends alors pas les sons en tant que tels – j’entends ce que je peux en faire pour créer de tout nouveaux sons. 

J’ai commencé à m’intéresser sérieusement aux sciences, et tout particulièrement à la mécanique quantique, en 2008-2009. À cette époque, la communauté scientifique s’enthousiasmait pour la théorie des cordes, grâce à laquelle, peut-être, une grande théorie du Tout allait enfin pouvoir être formulée. 

Serait-il donc possible que nous vivions dans un monde à onze dimensions et non quatre ? Fascinée, je me lançai dans une quête de savoir d’autant plus ardue que je ne possédais aucune connaissance particulière dans ce domaine et que je disposais de peu de temps libre. Je me tenais malgré tout au courant des théories émergentes même si je ne pouvais que les survoler.

La pandémie est toutefois venue changer la donne en me donnant enfin le temps de m’immerger dans les profondeurs de la mécanique quantique. Le phénomène qui me fascine tout particulièrement est celui de l’enchevêtrement quantique. La physique moderne n’en comprend pas de plus étrange que lui, hormis peut-être celui de la gravité : il défie toute explication logique. 

Ce n’est pas une mince affaire que de se mettre à étudier le monde à l’échelle de l’atome. Pendant les six premiers mois de mon initiation, je me trouvai perdue dans un brouillard à couper au couteau, mais j’en tirai une précieuse leçon : mécanique quantique et probabilités étant intrinsèquement liées, mes difficultés jouaient en ma faveur. En effet, il faut être prête à perdre tout repère avant de pouvoir s’ouvrir aux excentricités et aux terres inconnues mais envoûtantes de cet univers. Heureusement, j’eus la chance de trouver en M. Richard Hogdskin-Brown, qui fait son doctorat en Angleterre, un précieux mentor pour m’aider à assouvir ma soif de savoir.

L’enchevêtrement quantique

S’il est un phénomène étrange au royaume des particules, c’est bien celui de l’enchevêtrement, aussi connu sous le nom d’intrication quantique. Lorsque deux particules indépendantes (ou plus) entrent en relation, elles forment un unique système : leurs états deviennent interdépendants et le demeurent quelle que soit la distance qui les sépare. Cela veut dire que même si deux particules enchevêtrées sont très éloignées l’une de l’autre, toute mesure effectuée sur l’une donne la mesure correspondante de l’autre, mais aussi que toute action exercée sur l’une affecte inévitablement l’autre.

Il faut savoir qu’à l’échelle du monde quantique, on ne sait jamais rien de façon certaine. Il est notamment impossible de connaître la position exacte d’un électron dans un atome. On ne peut qu’énoncer des probabilités sur cette position. Alors un état quantique, c’est la description d’une propriété donnée, comme la position ou le moment cinétique d’une particule, exprimée au moyen d’une probabilité. Ainsi, pour un électron, son état quantique nous renseigne sur les positions où il est plus ou moins probable de se trouver dans l’atome parmi toutes les positions possibles.

Pour comprendre, remontons à l’année 1935. À l’époque, on savait que plusieurs états quantiques pouvaient être corrélés et que, dans ce cas, toute mesure effectuée sur l’un des états influençait le résultat des mesures effectuées sur les autres. Albert Einstein, Boris Podolsky et Nathan Rosen décident alors d’étudier ce phénomène. Ils démontrent ce faisant que lorsque deux particules sont fortement corrélées, elles perdent leurs états respectifs et se mettent à partager un seul état commun. 

Erwin Schrödinger, l’un des pères fondateurs de la mécanique quantique, est ensuite le premier à utiliser le terme d’enchevêtrement quantique pour parler de ce phénomène. Pour lui, l’enchevêtrement constitue l’aspect fondamental de la mécanique quantique, car son existence même marque une rupture complète avec les lois de la physique classique.

Mais ce que le trio Einstein, Podolsky et Rosen découvre également, c’est que si l’on connaît l’état quantique d’une seule particule au sein d’un système enchevêtré, on connaît instantanément celui des autres particules, aussi éloignées soient-elles les unes des autres. Elles pourraient être placées aux extrémités de la galaxie, ce serait en théorie toujours le cas. Et cela contredit la théorie générale de la relativité d’Einstein, d’après laquelle aucune information ne peut voyager plus vite que la lumière.

Ce phénomène porte le nom de paradoxe d’Einstein, Podolsky et Rosen, ou paradoxe EPR. Einstein le qualifiait d’« action surnaturelle à distance » et, pour lui, son existence prouvait l’incomplétude de la théorie quantique. Pourtant, des expériences menées depuis par des équipes aux quatre coins du monde confirment invariablement que des particules enchevêtrées interagissent instantanément quelle que soit la distance qui les sépare. À ce jour, la mécanique quantique demeure irréfutée. 

Est-il possible de provoquer le phénomène d’enchevêtrement ? Oui, il existe diverses façons d’y parvenir, l’une d’entre elles consistant à refroidir autant que possible des particules et de les rapprocher pour que leurs états quantiques (représentant l’incertitude de leur position) c’est-à-dire leurs positions possibles) se superposent au point qu’il devient impossible de les distinguer les unes des autres. On peut aussi utiliser les propriétés de la radioactivité : la désintégration d’atomes génère des particules élémentaires enchevêtrées. Autre solution encore, celle de scinder des photons en deux. Chaque paire de photon obtenue de cette façon est automatiquement intriquée. Il est aussi possible d’enchevêtrer des photons dans un câble de fibre optique. 

Dans la vie quotidienne, les propriétés de l’enchevêtrement quantique sont, entre autres, mises à profit en cryptographie. L’émetteur d’un message et son destinataire créent ainsi un canal de communication sûr qui contient des paires de particules intriquées. Ces dernières servent à générer des clés exclusivement personnelles pour crypter les communications. Si une tierce personne intercepte un message et tente de le décrypter, le lien qui unit les deux particules est immédiatement rompu, car la moindre intervention sur un système intriqué altère son état quantique. L’émetteur et le récepteur du message sont alors prévenus que le canal de communication n’est plus sûr. Impossible donc d’espionner une communication cryptée de cette manière.

L’intrication est également au cœur du principe de l’ordinateur quantique. Ce dernier contient de nombreuses particules enchevêtrées qui synchronisent leurs efforts pour résoudre rapidement des problèmes complexes. Un ordinateur quantique de dix qubits (« bits quantiques ») seulement possède une capacité de mémoire correspondant à 210 bits classiques.

La superposition d’états

L’enchevêtrement quantique découle d’un autre principe propre à la mécanique quantique qui porte le nom de superposition d’états. C’est ce principe qu’illustre Schrödinger avec son fameux chat. Dans cette expérience de pensée, un chat est placé à l’intérieur d’une boîte hermétique contenant des particules élémentaires dont les états ont autant de chance de changer que de ne pas changer, ainsi que du poison mortel qui sera répandu si un changement d’état survient. Pour l’observateur extérieur, le chat en question est à la fois vivant et mort, et non vivant ou mort : c’est le paradoxe de la superposition quantique. 

Si l’on décrit l’Univers en termes empruntés à la physique quantique, on peut dire qu’il est une gigantesque fonction d’onde qui se propage depuis son origine et s’éloigne de plus en plus de son point de départ. Tant que rien ne perturbe l’onde, l’Univers se trouve dans une infinité d’états différents dont l’évolution obéit à deux lois mathématiques distinctes. Mais lorsque la fonction d’onde se réduira, lorsque l’Univers se rétractera sur lui-même, il ne sera plus que dans un état unique, comme une particule qui a été localisée.

Revenons au principe de superposition : il énonce que s’il y a plusieurs configurations d’états possibles au sein d’un système physique, c’est-à-dire de manières dont sont arrangés ses particules ou champs, alors son état général est une combinaison de toutes les configurations possibles. C’est un nombre complexe qui précise la proportion de chaque configuration possible. 

« L’enchevêtrement quantique est l’application du principe de superposition des états à un système comprenant au moins deux sous-systèmes, un sous-système étant une particule.  

Imaginez d’un côté une particule 1 qui peut être dans l’un de deux états que nous nommerons A et C, et que ces états représentent deux propriétés contradictoires (il pourrait s’agir de sa position spatiale, par exemple) ; et de l’autre côté une particule 2 qui peut, elle, être dans l’un de deux états possibles notés B ou D. Encore une fois, ces états pourraient représenter des propriétés contradictoires telles que se trouver à deux endroits différents.

Une configuration possible est donc que la particule 1 soit dans l’état A tandis que de son côté la particule 2 est dans l’état B. Dans ce cas, le système est dans l’état AB. De même, si le système est dans l’état CD, cela signifie que la particule 1 est dans l’état C et la particule 2 est dans l’état D. Les états AB ou CD sont ce que l’on appelle des produits d’états

Au sein du système, les produits d’état AB et CD coexistent, si bien que l’état du système est la somme des produits AB + CD. On reconnaît le principe de superposition : il s’agit de la combinaison des états possibles de chaque particule appliquée à l’échelle du système à deux particules.  

Le principe de superposition permet au système d’être dans une telle combinaison d’états, et l’état AB + CD pour l’ensemble du système est appelé état enchevêtré. Alors que le produit d’état AB (et de même CD) attribue des propriétés définies aux particules 1 et 2 (ce qui signifie, par exemple, que la particule 1 est à l’emplacement A et la particule 2 à l’emplacement B), l’état enchevêtré – puisqu’il constitue une superposition – ne le fait pas. Il dit seulement qu’il y a des possibilités concernant les particules 1 et 2 qui sont corrélées, en ce sens que si des mesures sont faites, alors si la particule 1 se trouve dans l’état A, la particule 2 doit être dans l’état B ; et de même pour les états C et D.

La différence entre la superposition et l’enchevêtrement, c’est que dans un état superposé, chaque particule reste indépendante. On observe simplement que si de son côté la particule 1 est dans l’état A, il s’agit d’une propriété qui lui est propre et cela arrive indépendamment du fait que de l’autre côté, la particule 2 soit dans l’état C. Par contre, dans une configuration enchevêtrée, les propriétés attribuables aux particules ne sont plus indépendantes les unes des autres mais corrélées, c’est-à-dire que si la particule 1 est mesurée dans l’état A, alors la particule 2 est forcément dans l’état B, et inversement. Et si la particule 1 est mesurée dans l’état C, alors la particule 2 est forcément dans l’état D.   

En résumé, quand la particule 1 et la particule 2 sont enchevêtrées, on ne peut rien savoir de l’état de l’une sans connaître du même coup l’état de l’autre. Si on peut se référer à chacune individuellement lorsqu’elles sont dans les produits d’états AB ou CD, ce n’est plus le cas lorsque leurs états AB + CD sont superposés. C’est la superposition des deux produits d’états qui entremêle les particules. » *1

En d’autres termes, dans une interaction quantique, les ondes de deux particules interagissent et fusionnent en une seule grande onde commune aux deux particules et dès lors ces dernières forment un système commun caractérisé par une fonction d’onde unique. 

La superposition d’ondes explique le phénomène d’interférence, puisque chaque particule se comporte comme une onde tant qu’elle n’a pas été mesurée. L’expérience des deux fentes de Young met en évidence le caractère ondulatoire des particules : imaginez deux photons qui seraient confrontés à un mur infranchissable sauf par deux fentes. Les deux ondes traversent donc le mur aux deux mêmes endroits à la fois, ce qui résulte en une superposition de tous les états de ces photons. Cela modifie la fonction d’onde des photons, et donc leurs états possibles. Il faut alors utiliser la règle de Born pour calculer les nouvelles probabilités de localisation des photons.   

Pour résumer, le phénomène d’enchevêtrement s’observe lorsque les états d’au moins deux particules se superposent : le système interfère avec lui-même.

Bien que les physiciens s’accordent sur l’existence de tous les phénomènes ci-dessus, ils les interprètent différemment. Les deux principales écoles de pensée qui s’opposent ici sont l’interprétation dite de Copenhague et celle des mondes multiples. Toutes deux admettent les mêmes principes mathématiques fondamentaux, notamment l’équation de Schrödinger, qui permet de décrire tout système quantique et de déterminer l’état précis dans lequel il peut se trouver parmi tous les états possibles. Pour les tenants de l’interprétation de Copenhague, le fait qu’une mesure force la particule à choisir un seul état parmi tous ses états superposés s’appelle la réduction de la fonction d’onde. Les partisans de la théorie des mondes multiples, eux, nomment ce phénomène la décohérence, mais pour eux, la fonction d’onde ne choisit pas vraiment un état : tous ses états possibles continuent à s’exprimer, mais dans différentes versions de l’univers qui seraient parallèles à la nôtre.    

Le théorème de Bell 

Le physicien John Stewart Bell (1928-1990) a démontré que si deux séries de mesures sont effectuées indépendamment sur chacune des deux particules d’un système intriqué, la corrélation de leurs résultats ne peut être due à des variables cachées que si elles respectent des contraintes mathématiques connues aujourd’hui sous le nom d’inégalités de Bell. Mais plus tard au cours de sa carrière, John Bell démontra également que la physique quantique prédit certaines corrélations qui violent ces inégalités. Cela signifie que si variables cachées il y a, celles-ci sont forcément non-locales et capables de transmettre instantanément des informations entre les deux particules enchevêtrées même si ces dernières sont situées aux deux extrémités de la galaxie. Comme le dit Bell lui-même : « Si [une théorie des variables cachées] est locale, elle contredit la mécanique quantique. Si elle s’accorde avec les théories quantiques, elle viole le principe de localité. » Cette non-localité est effectivement en contradiction complète avec la théorie de la relativité d’Einstein. 

L’interprétation de Copenhague et la théorie des mondes multiples

Ces deux écoles de pensée s’opposent dans leurs interprétations respectives des fondements mathématiques de la mécanique quantique. À ce niveau, il ne s’agit pas d’un débat scientifique mais de divergences d’opinion et d’analyse philosophique, car aucune expérience n’est parvenue à trancher entre ces deux interprétations à ce jour. 

En d’autres termes, les deux écoles de pensée admettent la notion d’enchevêtrement quantique mais l’expliquent différemment quoique toujours en contradiction avec les lois de la physique classique. Mais justement, c’est cette particularité qui rend la notion d’enchevêtrement si intéressante au point de vue philosophique : elle nous force à remettre en question notre vision de la réalité que nous croyons guidée par le bon sens et qui s’avère pourtant lacunaire. 

L’interprétation de Copenhague 

La fonction d’onde d’un système quantique n’est pas un objet réel aux propriétés clairement définissables. Elle ne fait que décrire la probabilité de présence d’une particule mais ne donne pas son emplacement précis. C’est le physicien Max Born, s’appuyant sur le travail d’Einstein, qui est à l’origine de l’utilisation des probabilités en mécanique quantique. Il a démontré que la probabilité qu’une particule se trouve à un endroit donné est égale au carré de l’amplitude de la fonction d’onde de cet endroit.

Toute tentative d’effectuer une mesure sur le système intriqué se solde par une réduction de la fonction d’onde de sorte que cette dernière disparaît et la particule apparaît. 

Le second aspect essentiel que l’équation de Schrödinger a mis au jour est le principe de superposition : les ondes sont toujours superposables les unes aux autres parce que les courbes sinusoïdales et cosinusoïdales de paramètres donnés sont cumulables et peuvent être complètement démodulées conformément au principe de Fourier, nommé ainsi d’après le grand mathématicien Joseph Fourier. 

Bien que la fonction d’onde puisse se réduire à chacun de ces endroits, Born démontre que la probabilité qu’elle se réduise à un endroit précis est égale au carré de l’amplitude de la fonction d’onde, dont la somme est donc égale à 1.

Lorsque, dans certains processus, deux particules sont générées, ces deux particules partagent une seule et unique fonction d’onde qui permet de calculer tous les états possibles des deux particules, comme leur vélocité, leur moment cinétique, etc. Il suffit de prendre une mesure de cette fonction d’onde pour la réduire et faire apparaître les deux particules en même temps. Dans ces conditions, toute mesure effectuée sur l’une des particules revient à effectuer la même mesure sur l’autre particule exactement au même moment : c’est l’essence même du principe de l’enchevêtrement. Bien sûr, là où les choses deviennent vraiment étranges, c’est que même si les deux particules intriquées sont situées chacune aux deux extrêmes de l’univers, à l’instant même où l’on agit sur l’une, l’autre change d’état instantanément.

Pour résumer, les tenants de l’interprétation de Copenhague considèrent que le principe de superposition provoque l’enchevêtrement, c’est-à-dire la fusion des ondes en une seule, et que lorsque cette onde est réduite, elle fait apparaître les deux particules en même temps. 

La théorie des mondes multiples

Pour les défenseurs de la théorie des mondes multiples, la réduction de la fonction d’onde n’existe pas. À la place, la prise de mesure, en interagissant avec le système quantique, provoque une décohérence, c’est-à-dire une séparation de tous les états quantiques possibles, dont l’un s’exprime dans notre réalité et tous les autres s’expriment dans d’autres réalités parallèles à la nôtre. Les autres états existent donc, mais hors de notre portée. Le physicien David Deutsch compare ce phénomène à des polaroïds snapshots »). 

Cette interprétation soulève un certain nombre de questions simples, mais auxquelles seules des réponses très compliquées peuvent être apportées. Par exemple : 

1 – En quoi consiste réellement cette séparation en plusieurs mondes ?

2 – Trop de postulats sont sous-entendus, c’est bien trop complexe. 

Prenons deux particules. Chacune possède un moment cinétique intrinsèque et une position propre. En l’absence d’influence extérieure (macro), les deux particules sont exposées à une interaction quantique qui les sépare, mais cela n’affecte pas leurs états respectifs. 

Le moment cinétique combiné des deux particules doit demeurer exactement le même qu’avant la séparation de leurs états. La répartition du moment cinétique ne doit pas nécessairement être de 50-50, elle peut aussi être de 90-10, 55-45, etc. Il est impossible de connaître cette répartition compte tenu de la nature probabiliste de l’interprétation des nombreux mondes car on ne sait pas dans quel monde elles se trouvent. À ce sujet, l’interprétation des mondes multiples et celle de Copenhague sont d’accord : on ne sait absolument pas comment est réparti le moment cinétique avant d’avoir effectué la mesure.

Il faut savoir que dans tous les cas, de nombreux physiciens sont d’avis qu’il est inutile de trop spéculer sur l’interprétation du phénomène, car seul compte le fait que les principes mathématiques qui le décrivent demeurent valables : nous ne disposons pas à l’heure actuelle de moyens technologiques suffisants pour mettre au point une expérience permettant de confirmer l’une ou l’autre de ces interprétations.

Le principe d’incertitude d’Heisenberg

Le monde quantique comporte donc une part d’incertitude si intrinsèque qu’elle possède même un nom : le principe d’incertitude d’Heisenberg

Comme en physique classique, l’intrication quantique dit que lorsque l’on prend une mesure d’une particule et qu’on trouve qu’elle a un tiers de la quantité totale d’une grandeur observable, alors on sait que l’autre particule a les deux tiers.

Mais il faut aussi comprendre qu’en vertu du principe d’incertitude, vous ne pouvez pas connaître précisément à la fois la position et la vélocité d’une particule. Donc plus vous mesurez finement la vitesse, plus la position est vague. Inversement, plus vous ciblez la position de cette particule, moins sa vitesse est précisément calculable. 

En physique classique, on pourrait dire que ces incertitudes sont dues à des variables cachées et ne font que refléter le fait que l’observateur manque d’informations pour connaître à la fois la position et le moment cinétique de la particule. Il est impensable que le fait de mesurer une grandeur puisse en rendre une autre impossible à mesurer avec précision. Mais à l’échelle quantique, c’est pourtant bien ce qui se passe, et ce n’est pas à cause d’un manque de connaissance – l’incertitude est une propriété intrinsèque de la réalité elle-même.   

Donc, si l’on mesure la position, le moment cinétique ne peut plus nous être connu que de façon très imprécise. Cela peut être dû à la réduction de la fonction d’onde ou au fait que le moment cinétique soit éparpillé dans plusieurs copies de l’univers, en fonction de l’école d’interprétation que l’on préfère. 

« Dans le grand débat d’idées entre Einstein et Bohr, Heisenberg était nettement du côté de Bohr, tandis que Schrödinger était d’accord avec Einstein. 

La mesure de la position d’une particule est associée en mécanique quantique à l’application de l’opérateur de position à la fonction d’onde. La mesure d’une particule est comprise comme l’application de l’opérateur de dérivée partielle par rapport à la position à la fonction d’onde (l’impulsion, notée p, est classiquement la masse de la particule multipliée par sa vitesse, et la vitesse est définie comme la dérivée de la position par rapport au temps). Les deux opérateurs, position et le moment cinétique, ne commutent pas entre eux. Nous ne pouvons pas les mesurer en même temps.

Si nous connaissons l’un d’eux avec une bonne précision (celui que nous mesurons en premier), alors l’autre sera connu avec une faible précision. Ce fait que la position et la quantité de mouvement d’une même particule ne peuvent pas être localisés avec une grande précision, est appelé principe d’incertitude. Le principe d’incertitude d’Heisenberg est sa deuxième contribution importante à la théorie quantique après sa formulation de la mécanique matricielle. » *2

La décohérence quantique

Arrêtons-nous sur la grande différence entre la théorie des mondes multiples et l’interprétation de Copenhague. On a vu que la théorie des mondes multiples ne reconnaît pas la réalité du concept de réduction de la fonction d’onde. Pour elle, le phénomène de décohérence crée l’illusion d’une telle réduction.  

Le principe de décohérence quantique veut que la fonction d’onde passe progressivement d’une situation où elle s’exprime à travers de multiples états à une situation où elle ne s’exprime qu’à travers un seul état en raison de ses interactions répétées avec son environnement, lui-même constitué de fonctions d’onde (tout est constitué de fonctions d’onde). Toutes ces fonctions d’onde s’emmêlent les unes dans les autres jusqu’à produire un système enchevêtré d’une extrême complexité. 

Si nous reprenons le chat de Schrödinger, par exemple, nous devons préciser que cette expérience comporte certaines lacunes. L’échantillon radioactif au cœur du dispositif n’aurait réellement 50 % de chances de se désintégrer que si aucune mesure ne l’avait affecté au préalable. Or il est impossible dans la réalité des choses de garantir une situation vierge de toute interaction de l’environnement avec les atomes. De plus, un chat est un système gigantesque à l’échelle de la physique quantique, et chaque particule doit interagir ou être mesurée de nombreuses fois pour que sa fonction d’onde se réduise. En d’autres termes, l’expérience n’est pas du tout faite dans un milieu contrôlé en raison du fait qu’elle concerne le monde macroscopique, mais c’est bien ce qui intéresse la théorie des mondes multiples. À notre échelle, les phénomènes quantiques sont très difficiles à isoler, cela explique pourquoi il est impossible d’enchevêtrer des systèmes macroscopiques.       

Le temps en physique contemporaine

Qu’est-ce que le temps ? On admet généralement comme une évidence que le moment présent n’est pas fixe mais se décale toujours un petit peu plus vers le futur : c’est ce que l’on appelle l’écoulement du temps, sur lequel est fondée notre perception de ce si mystérieux concept de temps. 

On dit souvent, donc, que le moment présent semble avancer dans le temps, car on ne le définit que relativement à notre conscience, qui se meut elle aussi d’instant en instant. Pourtant, ce n’est pas vraiment ce qui se passe, car la conscience ne peut absolument pas fonctionner ainsi : on établit un parallèle entre la conscience et la théorie de l’écoulement du temps, et au premier abord cela semble être tout-à-fait raisonnable. Mais ni le temps ni la conscience ne sont réductibles à de simples unités ponctuelles qui avancent par petits bonds de moment en moment. Rien ne peut fonctionner ainsi en réalité : tout ce qui existe à un moment donné existe dans ce moment pour toujours, et notre conscience existe à chaque instant que nous passons à l’état éveillé.

En fait, nous discernons la différence entre notre perception de l’instant présent et nos souvenirs présents de perceptions passées. Nous interprétons correctement ces différences comme la preuve que l’univers change avec le temps. Nous les interprétons également de manière incorrecte, comme une preuve que notre conscience, ou le présent, ou quelque chose se déplace dans le temps.

Imaginons que le moment présent soit vraiment mobile : s’il cessait ses petits bonds vers le futur pendant quelques jours, puis reprenait sa course dix fois plus vite qu’auparavant, percevrions-nous quelque chose d’inhabituel ? La réponse est non. En fait, cette question n’a aucun sens. Il n’est rien qui ne puisse se mouvoir, s’arrêter ou s’écouler, et cette notion d’écoulement du temps n’a aucun fondement réel. On imagine la réalité comme une succession d’images figées (“snapshots”) comme des perles sur un fil – ou comme des événements sur une chronologie –, la réalité étant ici la somme de toutes les perceptions conscientes de tous les observateurs… y compris leur conception erronée que le temps s’écoule. Sauf que ce n’est pas parce que nous nous représentons le temps comme une ligne sur laquelle l’instant présent avance, s’arrête et repart – parfois en sens inverse – le tout cessant même quelquefois d’exister complètement, que cette représentation reflète la réalité : rien n’avance sur la ligne… le temps ne s’écoule pas.

Mais alors, pourquoi nous accrochons-nous autant à ces deux notions contradictoires du présent qui avance et de la succession de moments différents ? Parce que nous en avons besoin – ou nous croyons en avoir besoin – dans la vie de tous les jours. Nous y faisons constamment référence, quoique séparément. Nous percevons les événements comme étant des successions d’instants figés et nous structurons ces événements les uns par rapport aux autres en fonction de rapports de cause à conséquence comme si le présent était mobile. 

Mais la structure de la réalité contient déjà le passé et le futur. Quant au présent, il n’est en fait qu’un mirage résultant de la manière dont fonctionne notre conscience. Nous ne faisons, en réalité, aucun choix – même lorsque nous croyons être en train de nous décider entre plusieurs choix possibles, la décision finale est déjà prise et présente sur sa petite tranche d’espace-temps, inaltérable, comme tout dans l’espace-temps. Nos délibérations n’y font strictement rien, même si elle nous paraissent elles-mêmes altérables, elles sont pourtant déjà là, elles aussi, sur leurs tranches de temps, avant même que nous le sachions.

Les énoncés en « si… alors » ne peuvent être résolus dans un monde physique basé sur l’espace-temps, car ce dernier est régi par une règle incontournable : une seule chose se passe en réalité, tout le reste n’est que le produit de notre imagination. Cet état de fait signifie nécessairement que les énoncés conditionnels dont la prémisse n’est pas vraie, par exemple « Si Faraday était mort en 1830 », ne veulent strictement rien dire. En logique, cela s’appelle le conditionnel contrefactuel. Les énoncés contrefactuels sont des paradoxes. 

Les quatre piliers d’inspiration de mes albums

Source 1 – L’écoulement du temps

À la mort de son ami Michel Besso, Einstein, très affecté, écrivit à la famille Besso une lettre aujourd’hui bien connue : « Et là, il a quitté ce monde bizarre un petit peu avant moi. Cela ne veut rien dire. Les gens comme nous, qui croient à la physique, savent que la distinction entre le passé, le présent et l’avenir n’est qu’une illusion obstinément persistante. » Cette conception du temps, je l’ai étudiée en plein deuil de ma mère et de ma sœur. Elle m’a tellement aidée qu’elle est devenue l’une de mes quatre principales sources d’inspiration : comment puis-je traduire en musique l’idée que la linéarité du temps n’existe pas, quand un morceau de musique se déroule de façon linéaire ?   

Source 2 – L’enchevêtrement quantique

L’enchevêtrement, ou intrication quantique, est un phénomène d’union de deux particules en un seul et unique système au sein duquel les deux particules deviennent codépendantes quelle que soit la distance qui les sépare. Un tel état est dit « intriqué » car il existe des corrélations entre les propriétés physiques observées de ces particules distinctes. Le théorème de Bell montre que l’intrication donne lieu à des actions non locales entre les particules.

Ainsi, si par exemple deux particules O1 et O2 sont enchevêtrées, cela ne signifie pas que les deux particules ne sont pas indépendantes, même si elles sont séparées par une grande distance, et nous devons considérer {O1 + O2} comme un seul système.

Je vais créer quatre albums, en les percevant comme des systèmes, au sein desquels ces albums (particules) dépendent les uns des autres, quelle que soit la distance qui les sépare. Du point de vue de mon projet, la distance ici sera exprimée par le temps. Les états et les corrélations physiques seront représentés par le fait qu’un premier album produit sera dépendant du second de sorte que les deux albums devront être écoutés simultanément, donc les deux albums seront considérés comme un seul système et faisant référence au principe de non-localité.

Source 3 – L’interprétation de Copenhague

À l’heure actuelle, les deux écoles de pensée pour expliquer le phénomène de l’enchevêtrement sont l’interprétation de Copenhague, avec son application de l’équation de Schrödinger, et la théorie des mondes multiples de Hugh Everett. 

L’interprétation de Copenhague est ainsi nommée du fait qu’elle est le fruit de la pensée du physicien Niels Bohr, qui remettait en question l’existence d’un temps absolu et d’une réalité qui s’inscrit hors du temps et de l’espace. Pour Bohr, il est essentiel de ne jamais perdre de vue que le rôle de la physique est avant tout de décrire ce qui est strictement observable.

L’univers décrit par l’équation de Schrödinger se compose de vastes champs quantiques au sein duquel ondulent de nombreuses fonctions d’onde. Ceux-ci représentent l’état quantique d’un système dans une base de dimension infinie. L’effondrement de la fonction d’onde est un concept fondamental pour les tenants de l’interprétation de Copenhague, selon qui, après une mesure, un système physique (par exemple une particule) voit son état entièrement réduit à celui qui a été mesuré. Ainsi, la particule ne peut pas se voir attribuer une position précise dans l’espace et le temps avant la mesure.

C’est le simple fait d’observer une fonction d’onde qui contraint celle-ci à se réduire, nous donnant ainsi une panoplie de probabilités de position d’une particule. En effet, la particule ne se matérialise que lorsque la fonction d’onde se réduit. Pour l’interprétation de Copenhague, c’est la réduction instantanée de la fonction d’onde commune à deux particules intriquées qui permet de connaître ces possibilités de position. Je cherche à traduire ces concepts d’intrication et de réduction de la fonction d’onde en musique au moyen d’ondes musicales et de fréquences sonores.

Source 4 – La théorie des mondes multiples

Le physicien Hugh Everett propose une vision complètement différente – et controversée – de la réalité dans sa théorie des univers multiples, aussi connue sous le nom des mondes multiples. Cette théorie repose sur la notion de décohérence quantique, qui aujourd’hui apporte une explication à la raison pour laquelle les lois les plus étranges de la mécanique quantique ne s’observent jamais à l’échelle macroscopique.

En écartant la notion de réduction de la fonction d’onde, Hugh Everett prend le contrepied de l’interprétation de Copenhague. Sa notion de décohérence quantique décrit la perte d’informations d’un état quantique spécifique lorsqu’il interagit de manière répétée avec son environnement. Il se passe un peu la même chose en physique classique : quand une particule est chauffée, elle s’agite de manière désordonnée, ce qui modifie son état. Le phénomène apparent d’effondrement de la fonction d’onde est plutôt le résultat d’une décohérence quantique : l’interaction entre le système quantique et un système macroscopique conduit à de nombreux cas distincts de l’appareil d’observation, et la mesure finale que l’observateur voit se trouve dans un seul de ces univers.

La théorie des mondes multiples se débarrasse ainsi de la notion de réduction de la fonction d’onde pour expliquer le phénomène d’enchevêtrement quantique plus simplement : les particules conservent leur état initial même après une interaction, et le caractère aléatoire des résultats de mesures est simplement la conséquence du fait que de nombreux mondes parallèles sont générés sous l’effet de décohérence provoqué par les appareils de mesure.

Il faut noter toutefois que le terme d’univers multiples associé à cette théorie peut induire en erreur. Pour Everett, il n’y a bien qu’un seul univers, mais ce dernier est séparé en sections parallèles étanches les unes aux autres. Les conséquences à l’échelle macroscopique de l’existence de ces sections ne sont pas du tout mesurables à l’heure actuelle.

Comment puis-je représenter cette notion de décohérence alors que notre monde macroscopique détruit la pureté des phénomènes quantiques ? L’idée qu’un système perde une partie de ses données qui se noient dans leur environnement est inspirante. 

Mes recherches sur la mécanique quantique ont ainsi fait naître l’inspiration à l’origine des quatre albums que je vais composer, qui fonctionneront comme deux paires d’albums enchevêtrés. En ce qui concerne l’équation de Schrödinger, je la représenterai en évoquant la réduction de la fonction d’onde au moyen de fréquences et ondes musicales. Quant à la décohérence, je l’exprimerai en proposant mes albums à l’écoute sur Bandcamp, ce qui permettra de les écouter simultanément. Enfin, j’utiliserai des disques vinyle pour traduire l’intrusion d’un monde macroscopique dans un monde numérique.   

Mon interprétation des photons sombres

De 2017 à 2019, une étrange partenaire de vie s’est immiscée dans l’intimité de mon quotidien : la Mort. Profondément affectée par la perte de Mika Vainio et de trois membres de ma famille, je plongeai dans une réflexion profonde sur la vie, la mort et tout ce qu’il y a entre les deux. C’est dans cet état d’esprit que je me trouvais lorsqu’un jour, au gré de mes recherches sur la philosophie de la science, je tombai sur les photons sombres.    

Il y a les photons normaux, ceux que nous pouvons voir ou au moins détecter avec des instruments. Mais les photons sombres sont invisibles. On ne peut les détecter que de manière indirecte, lorsqu’ils interfèrent avec des photons normaux. 

Photons et photons sombres partagent les mêmes propriétés intrinsèques : ils sont tangibles dans leur univers et intangibles dans tous les univers parallèles au leur.

Ainsi, les photons sombres se déplacent à la vitesse de la lumière, rebondissent sur les surfaces réfléchissantes, sont réfractés par des lentilles et bloqués par des panneaux opaques ou encore des filtres de certaines couleurs. Et malgré tout, ils échappent aux détecteurs les plus sensibles ! La seule chose qu’un photon sombre peut affecter est son photon jumeau normal. Ce phénomène se nomme l’interférence et on l’observe du fait qu’il crée des motifs d’ombres assez particuliers sans lesquels nous n’aurions aucune idée de l’existence des photons sombres. » *

J’établis un parallèle entre la mort et les photons sombres : les univers parallèles, le phénomène d’interférence, la façon dont un photon sombre affecte son photon jumeau dans notre réalité me font penser à la mort comme un univers inconnu et immatériel parallèle au nôtre qui nous affecte malgré tout, nous les humains qui demeurons dans l’univers matériel. Cette perspective m’a amenée à accepter plus facilement le chaos dans ma vie et à dire que La Mort est perfection, tout le reste est relatif

En guise de conclusion, je vous offre cette citation de Bohm qui éclaire, je l’espère, notre conception de la réalité : 

« Je suis convaincu que la raison pour laquelle des particules élémentaires sont capables de rester liées quelle que soit la distance qui les sépare n’est pas qu’elles parviennent à communiquer en s’envoyant des signaux qui nous échappent, mais que leur séparation est une illusion. »

Je remercie mille fois M. Richard Hodgskin-Brown d’avoir été un mentor aussi doué que patient. Grâce à lui, j’ai pu acquérir une compréhension très fine du phénomène de l’enchevêtrement quantique et avancer dans mes recherches sans me disperser. Il m’a aidée à organiser mes pensées et m’a expliqué des concepts complexes avec une clarté impressionnante. Je lui suis très reconnaissante, parce que je continue à apprendre encore aujourd’hui. Entre l’abandon et la flamme de la persévérance se dresse souvent un mentor d’exception.  

France Jobin ©2023

Traduction: Céline Vergne

*1 Entanglement, Amic C Aczel, Entanglement – Amir Aczel, John Wiley & sons Ltd, 2003

*2 Entanglement, Amic C Aczel, Entanglement – Amir Aczel, John Wiley & sons Ltd, 2003

Sources :

Articles et ouvrages

https://www.livescience.com/what-is-quantum-entanglement.html
Aczel, Amir, Entanglement, John Wiley & sons Ltd, 2003
Brody, Jeff, Quantum entanglement, MIT Press, 2020
Clegg, Brian, The God effect, St-Martin’s Press, 2006
Deutsch, David, The Fabric of Reality, Penguin Press, 1997
Hawking, Stephen, A brief history of time, Bantam Book, 1988
Kaku, Michio, Hyperspace, Oxford University Press, 1994
Rovelli, Carlo, Seven Brief Lessons in Physics, Riverhead Books, 2014
Rovelli, Carlo, Reality is not what it seems, Riverhead Books, 2017

Cours et conférences 

Aspect, Alain, Le photon onde ou particule ? L’étrangeté quantique mise en lumière :  
Carroll, Sean, The Biggest Ideas in the Universe | 5. Time :Carroll, Sean, The Biggest Ideas in the Universe | 8. Entanglement
MIT Open Course Ware :
Rovelli, Carlo, The Illusion of time :

Bibliographie pour la traduction 

Barrau, Aurélien, Des univers multiples, EKHO, 2020

Bobroff, Julien, La quantique autrement, Flammarion, 2020

Bricmont, Jean, Comprendre la physique quantique, Odile Jacob, 2020

Léon, Jacques, La physique quantique dans tous ses états, Ellipses, 2019

Lucchese, Vincent, L’écoulement du temps est une illusion, 2016, disponible à l’adresse https://usbeketrica.com/fr/article/l-ecoulement-du-temps-est-une-illusion